Nombreux sont ceux qui s’inscrivent à mes ateliers d’écriture en disant qu’il y a longtemps qu’ils avaient envie d’écrire mais qu’ils n’osaient pas, qu’ils trouvent que c’est un peu prétentieux de leur part d’y penser… Mais pourquoi? Est-ce que c’est notre éducation française qui a insufflé en nous ces inhibitions face à l’écriture, elle qui sait si bien transmettre le respect de la langue et de la littérature françaises mais les présente en même temps comme des domaines où ne peuvent s’aventurer qu’un tout petit nombre, des happy few qui auraient eu la chance de… La chance de quoi d’ailleurs ? D’avoir vu la Bonne Fée de l’Ecriture penchée au-dessus de leur berceau à leur naissance ?…
Personnellement, je suis tombée amoureuse de l’écriture dès l’école primaire, époque où je me délectais à écrire ce qu’on appelait en ce temps-là les « textes libres » et puis au Collège où je passais des heures de pur plaisir à inventer des histoires pour mes « rédactions ». Malheureusement, en Seconde, au moment-même où j’ai fait solennellement le choix de consacrer mes études aux Lettres (ignorant l’avis de tous les gens bien intentionnés autour de moi qui me conseillaient de « faire des maths » parce que ça m’ouvrirait plus de portes…), il n’a plus du tout été question d’écrire mes propres textes : pendant les six années qui ont suivi, on a seulement attendu de moi que je commente, explique, analyse les textes que d’autres avaient écrits.
Je n’aurais jamais eu l’idée de créer mon premier atelier d’écriture en langue française, en 2004 à Londres, si je n’avais pas découvert en y arrivant les Creative Writing workshops où j’ai appris avec ravissement que si l’on veut être écrivain, il y a essentiellement une chose à faire : écrire ! J’adore cette approche pragmatique anglo-saxonne. Pour moi l’écriture est un art et en même temps un artisanat qui requiert l’inventivité, la patience, la persévérance et le talent d’un orfèvre désireux de fabriquer d’intéressantes histoires, ciseler de belles phrases, déployer la bonne trame, modeler des personnages inoubliables : un atelier d’écriture, c’est une forge ! On y écrit, on lit, on discute, on rature, on jette, on recommence. C’est amusant et c’est formateur. Comme au Conservatoire, comme aux Beaux-Arts, on est là pour expérimenter, pour pratiquer, pour apprendre des techniques utiles à cette forme artistique, pour faire des progrès. Je suis en train de refaire mon Website et le jour où j’ai trouvé le nom que je vais lui donner : « Lis Tes Ratures », j’étais super fière de mon petit jeu de mots! (jusqu’au moment où, en vérifiant sur le net, je me suis rendu compte que Roland Barthes avait déjà remarqué l’homophonie il y a longtemps mais bon….). Il traduit en effet parfaitement ma philosophie en tant qu’animatrice d’ateliers d’écriture et conseillère littéraire : j’aime l’idée qu’on n’a pas besoin d’avoir tout juste du premier coup, que les ratures, c’est bien, c’est comme ça qu’on progresse!
D’après un article paru sur le blog de la librairie La Page à Londres en Juin 2017: